mercredi 28 mars 2018

Bonjour, j'ai 9 ans, et je veux acheter The Walking Dead

Ah ben c'est ce qu'on appelle un bon titre putaclic. Ça commence bien pour un premier article concret sur ma vie trépidante de libraire. Pourquoi ce titre ? Est-ce que je n’exagère pas un peu ? Non. Fin de l'argumentation. Merci. Au revoir.

...

Bon. Reprenons.

Il y a un petit bout de temps, un garçon d'une dizaine d'années est venu à la caisse pour acheter un album de The Walking Dead. J'ai naturellement demandé à l'un des parents présents s'il savait de quoi parlait la BD que son enfant voulait prendre. De mémoire, la personne m'a répondu qu'elle ne connaissait pas trop et que son gamin regardait la série télévisée. (Ah.)

J'ai alors pris la peine de lui montrer quelques pages d'un tome. Son visage s'est subitement crispé. (Oui, ça peut choquer un peu.) J'en ai rajouté une couche en précisant qu'il y avait parfois des viols, des meurtres plutôt gores, et que les zombies, c'était au final ce qu'il y avait de plus soft. (Je suis sympa, non ?)


Cet épisode m'a marqué, et je le ressors fréquemment quand on me demande un comics pour un jeune de 10 ans ou moins. Ce n'est pas très régulier, mais ça arrive quand même. Généralement, les enfants se tournent vers des super-héros connus tels que Spider-Man. Ils veulent lire des titres sur eux, car l'un de leurs parents en a dans sa bibliothèque par exemple. Peut-être par mimétisme, ils souhaitent la même chose.

Il y a quelques jours, une cliente m'a raconté que son garçon avait eu un comics The Superior Spider-Man à prêter par l'un de ses copains à l'école. Sachant qu'on avait déjà discuté du sujet ensemble, elle était venue me demander mon avis. En toute honnêteté, j'avais un peu beaucoup oublié notre conversation, et j'ai donc ressorti l'épisode The Walking Dead. (Je radote, et je n'ai pas 30 ans. Misère.) 

Après ça, je lui ai expliqué que le souci avec le comic book, c'est que la quasi-totalité des titres n'est pas pour un public de moins de 12 ans. Ce n'est pas forcément une question de scènes de cul ou de violence gore. La plupart du temps, il s'agit juste de maturité à avoir, et ce, même si on parle de comics de super-héros avec des slips par dessus le pantalon. (N'essayez pas ça chez vous. Ça gratte atrocement.) Petit à petit, grâce notamment à l'arrivée de l'éditeur Urban Comics et de sa collection Urban Kids, des titres commencent à sortir pour un jeune public. Mais il faut avouer que le choix reste très restreint, et je peux comprendre la frustration des gamins voulant s'y plonger.

Depuis que je fais ce métier, je mets un point d'honneur à prévenir au maximum les adultes. On ne peut pas tout connaître, et je conçois parfaitement l'ignorance de certains parents face aux choix de leur progéniture. C'est pour cette raison que j'essaie de les sensibiliser en leur faisant comprendre qu'il faut regarder, ne serait-ce que quelques pages, les ouvrages choisis par leurs chères têtes blondes. Ce n'est pas parce que c'est de la bande dessinée que c'est inoffensif. Comme tout média, il faut veiller au public visé. 

La société a tendance à faire grandir trop vite les enfants. Ils ne profitent plus assez de ce qui est fait pour leur âge. Il faut grandir rapidement ou paraître plus grand qu'on est pour plaire à la cour de récréation. Je suis passé par là étant plus jeune. Comme vous sans doute. Après, j'ai toujours été de nature réservée, et je n'ai jamais voulu être la star de la classe. De toute façon, je n'y serai pas arrivé. (Confiance en moi, où est-tu ?)

De nos jours, il y a aussi la rapidité qu'offre Internet, qui pèse beaucoup dans la balance. Vous aurez beau refuser à un gosse de regarder ou de lire The Walking Dead, il pourra toujours voir la scène où Glenn se fait tabasser à coups de batte par Negan sur Youtube à la récré. (Merde, j'ai l'impression de parler comme un vieux con. Non, je ne pense pas. Si ? Tant pis, ce qui est écrit est écrit.) À dire vrai, je crois qu'il faut savoir laisser le temps au temps. 

Dans le cadre de mon métier, je cherche toujours à proposer des titres plus adaptés quand des enfants veulent des ouvrages adultes. Parfois, ça se solde par aucune vente. Tenez, dernièrement, un gamin voulait acheter The Ultimates chez Panini. Après discussion avec les parents, ils ont tenté de lui trouver autre chose, mais sans résultat. Je précise que dans ces cas-là, je préviens juste les accompagnateurs. Je n'ai pas à leur interdire l'achat. C'est à eux de prendre leurs responsabilités et la décision finale. Ils ont l'air de tous le comprendre. J'ai du bol, mes clients sont globalement très sympas (et j'aime les caresser dans le sens du poil).

Heureusement, la BD est un secteur tellement riche que, le plus souvent, l'enfant trouve quelque chose d'adapté qui lui plaît. La première cliente dont je parlais au début a ainsi pris Batman et les Tortues Ninja Aventures et Justice League Aventures dans la collection Urban Kids. Amateur des tortues et finalement pas très emballé par le comics Spider-Man de son ami, il y a de fortes chances que son gosse s'éclate avec ces lectures. Mais est-ce que ce sera vraiment le cas ? Le hasard faisant bien les choses, au moment où j'allais publier cette note, la mère est revenue avec son fils. Ce dernier n'a pas lâché ses deux BD du week-end et les a même prêté à ses copains, dont celui qui lui avait passé le fameux Spider-Man. Il a quitté la boutique avec deux autres albums, et on sentait son envie irrésistible de les lire dès que possible. (Je fais quand même un bien beau métier.)

Je ne suis pas encore parent, et je ne sais pas comment se passera ma relation avec mes enfants si j'en ai. (Quoi qu'il arrive, je ne laisserai pas seul mon gamin dehors sous prétexte qu'il ne veut pas rentrer dans le magasin où je vais. Oui, ça existe.) Je sais pertinemment que je ne pourrai pas veiller sur tout ce qu'ils lisent, regardent et jouent. C'est mission impossible. Néanmoins, dès que je le pourrai, je tâcherai de leur proposer un contenu adapté. Je commencerai d'ailleurs par leur montrer (au pif) Power Rangers : Mighty Morphin, les Tortues Ninja, sans oublier de leur faire découvrir La Jeunesse de Picsou. C'est plutôt un beau programme. Non ?

vendredi 23 mars 2018

Coucou

En voilà un titre de blog original. (Non, on ne va pas parler de la bannière...) En même temps, il faut bien commencer quelque part. Bonjour, bonsoir à tous et à toutes ! (Rayez la ou les mentions inutiles.) Je m'appelle Nicolas, j'ai presque 30 ans, et ça va faire quatre ans en août prochain que je suis libraire. (Ça fait un peu réunion des alcooliques anonymes, non ?)

J’exerce mon métier à Dunkerque à la libraire spécialisée Aventures BD. Mon chef, c'est Christophe. Dans le jargon, c'est lui qu'on appelle le big boss. Il est à l'écoute, carré et proche de ses employés. (Je suis le seul, donc ça va.) Il sait reconnaître vos qualités et compétences sans forcément vous le dire, et ce, tout en vous laissant une grande liberté d'action. En gros, s'il ne fait rien remarquer, c'est que le boulot est nickel. J'ai du bol, il ne me dit quasiment rien. Par contre, sur mon humour, il aurait de quoi vous raconter. Bref, c'est lui qui m'a appris les ficelles du métier, et il continue de le faire. Il me reste tant à apprendre que je me demande si je pourrai un jour être capable de gérer une librairie seul. (Ça, c'est pour vous montrer que je n'ai pas une grande confiance en moi, mais je progresse. Je crois.)

Après des études littéraires et un master en littérature de jeunesse (Appelez-moi, maître ! Ou pas... Je ne suis pas difficile.), j'ai effectué deux mois en stage à Aventures BD et deux autres ailleurs. (J'en parlerai peut-être un jour.) Ensuite, le déménagement de la boutique aidant, il m'a embauché à plein temps. Voilà en gros pour la fiche technique. (Sinon, je fais 1m83, je chausse du 45, et j'ai "un peu" de bourrelets en trop.)

Sinon, pourquoi ce blog ? Ce n'est pas pour grappiller les lecteurs de Les libraires se cachent pour mourir. Certes, je lis régulièrement ses notes. En plus, il a rouvert son blog alors que l'idée de lancer le mien me trottait dans la tête depuis un moment. Une simple question de timing en somme. Mais ce serait mentir de dire qu'il ne m'a pas inspiré. D'ailleurs, si vous ne le connaissez pas (Sérieusement ?), courez le lire sans attendre. Un homme qui aime Calvin & Hobbes ne peut pas être mauvais. 

Bon. Où en étais-je ? Ah oui. Peu après mon recrutement, je me suis accaparé la communication de la page Facebook de la boutique et la tenue générale du site. J'ai ainsi lancé une newsletter hebdomadaire à compter d'octobre 2013. (La première n'est pas des plus fameuses, mais je dis ça à chaque fois, donc bon.) Dès le départ, mon envie n'était pas de proposer un simple résumé des sorties de la semaine. Je voulais partager mes lectures, l'actualité marquante du neuvième art ou encore écrire un édito plus ou moins court sur des sujets liés à la BD. Au fil de temps et de l'assurance prise, j'ai commencé à développer cet aspect de la lettre en étant de plus en plus direct sur certains éléments (la situation des auteurs, les chasseurs de dédicaces, les polémiques à la con, etc). J'y partage aussi des anecdotes et réflexions sur mon travail (le montage d'une PLV en carton, ma passion du chocolat chaud, et j'en passe).

Dernièrement, j'ai réalisé des éditos assez longs. Le souci, c'est que j'ai l'impression d'être à l'étroit dans le format de la newsletter. De plus, je ne souhaite pas réaliser de lettres trop longues. Selon moi, elles doivent être relativement rapides à lire.

C'en est terminé pour les raisons qui m'ont poussé à vouloir lancer un blog. J'aime écrire, j'aime réagir sur la BD, et j'aime parler de mon métier. Du coup, j'espère avoir l'occasion de partager encore davantage ici. Et j'espère que vous serez plusieurs à me suivre. En tout cas, peu importe, ça me donne une autre occasion de dire des conneries. C'est déjà ça.