vendredi 25 mai 2018

Mais pourquoi j'ai commandé ça ?!

Être libraire, c'est parfois expérimenter le voyage dans le temps. Je vous arrête tout de suite, il n'y a ni scientifique à la chevelure ébouriffée, ni DeLorean. On connaît juste les nouveautés, qui arriveront dans les mois à venir. (C'est déjà pas mal.)

Tous les deux ou trois mois environ, il y a un représentant de passage à la librairie. Pour la faire courte (car j'en parlerai plus tard), cette personne représente une poignée d'éditeurs et nous déroule leur programme pour les mois à venir. À partir des informations données par les maisons d’édition, des dires du représentant et de nos ressentis, nous prenons des quantités par bouquin que l'on recevra des mois après.

Entre-temps, d'autres représentants arrivent, et plein de choses se passent à la boutique. Du coup, il faut avouer qu'en dehors de sorties importantes et d'attentes personnelles, on a tendance à zapper ce qui va nous parvenir dans les cartons. (On ne s'excuse même pas.) De toute façon, c'est impossible de se souvenir d'environ 5000 nouveautés par an. (Je suis déjà infoutu de me rappeler du nom des clients qui passent régulièrement. Alors, une BD qui sort dans trois mois.)

D'un côté, c'est une bonne chose, car on garde la surprise quand on ouvre les colis. (Oui, c'est un peu Noël tous les jours en librairie.) Le souci, c'est qu'on a parfois la mauvaise surprise de recevoir des bouquins d'une qualité toute relative (et je pèse mes mots). 

J'ai un profond respect pour le travail des auteurs de bandes dessinées. Je trouve cela presque magique de réussir à concevoir tout un univers à partir d'une simple feuille blanche. Mais il faut arrêter d'être aveugle et se rendre compte que des ouvrages ne devraient pas être publiés. (Je sais, je suis méchant. Ça m'arrive.) De toute façon, avec la production actuelle, il faut faire un tri tôt ou tard. C'est nécessaire pour éviter de se retrouver avec une librairie s'apparentant davantage à un vulgaire entrepôt. De plus, à terme, ce n'est rendre service à personne de tout accepter. Tout ne pourra pas se vendre.

Illustration tirée de la BD Animal Lecteur par Libon et Sergio Salma.

Malheureusement, même en tâchant d'être prudent et en n'hésitant pas à faire l'impasse totale sur des titres, il arrive qu'on fasse de légers impairs. Récemment, nous avons reçu la BD de Jeff Panacloc, un célèbre ventriloque. Je n'ai rien contre lui, et les auteurs n'ont pas à avoir honte de leur boulot sur cet ouvrage. De ce que j'ai pu feuilleter, cela reste un album humoristique classique comme il y en a déjà trop. Mais ce type d'ouvrage ne se vend pas chez nous sauf à de très rares exceptions. Là, on en a reçu cinq exemplaires. Ce n'est pas la mort cinq exemplaires, mais ça nous bouffe déjà un peu de place sur un présentoir de nouveautés assez chargé. Après vérification, il s'est avéré que c'est bibi qui avait noté ces quantités. (Mais qu'est-ce que j'ai foutu ce jour-là ?!) J'avoue que je ne comprends pas. Au pire, j'en aurais pris deux. Pour me donner bonne conscience, je me suis aperçu que l'artiste allait faire un spectacle au Kursaal de Dunkerque en... janvier 2019. (Ok, je n'ai vraiment pas d'excuse.) D'ici là, la BD aura été retournée depuis longtemps. C'est un peu triste... ou peut-être pas.

mardi 22 mai 2018

Moutame Power !

Bon, bon, bon... Alors, ça lance en grande pompe un blog sur son quotidien en librairie. C'est joli tout ça. Mais ça fait combien de temps que le dernier billet a été écrit ? Comment ? Presque deux mois ?! Ah oui, quand même. Ça commence bien cette histoire.

Je n'ai pas vraiment d'excuses pour ce silence. D'ailleurs, en ai-je à donner ? Non. Tout le monde s'en fout, je pense. Le plus important, c'est que je suis décidé à prendre un certain rythme depuis le début. C'est juste plus compliqué que prévu. Certes, j'ai été occupé dernièrement, mais j'avais le temps d'écrire. C'est ce que j'ai fait. Trois notes sont quasiment finies. Or, comme j'essaie de coller le plus possible à l'actualité de mon boulot, j'ai tendance à commencer un nouvel article avant de publier le précédent. Et vous savez quoi ? J'en décale encore un pour publier ce que je vous écris ici.

Bref. Reprenons tranquillement. Dernièrement, j'ai passé le cap des 30 ans. Je sais, ça ne concerne pas directement mon métier. En fait, si, en un sens. J'ai fêté mes 30 ans et je célébrerai aussi mes 4 ans en tant que libraire au mois d'août prochain. C'est assez con de dire ça, mais ça me fait un petit quelque chose. Je ne suis plus un enfant ou un libraire débutant. Ce n'est pas pour autant que je dirais que j'ai déjà tout vu. C'est mal me connaître. (Ma piètre estime de moi-même en est un bon exemple.). Je considère qu'on est continuellement en apprentissage de quelque chose dans la vie. J'ai toujours dis, le jour où je serais blasé de recevoir des nouveautés à la librairie, il sera temps pour moi d'arrêter les frais. C'est loin d'être le cas, et j'espère que ça n'arrivera jamais.

Plus le temps passe, et plus je me sens en confiance à la boutique. Il faut dire que le big boss me facilite quotidiennement les choses. Vous en connaissez beaucoup des patrons qui vous laissent une liberté quasi-totale lors de votre premier jour de stage ? Quand j'y réfléchis, je reste étonné de la confiance qu'il a eu à mon égard dès les premiers jours. Mais arrêtons de faire de la lèche. (Ça risque de se voir.)

Peu à peu, je me suis senti suffisamment à l'aise pour mettre en avant ma personnalité. Cette assurance se ressent à travers le surnom du petit libraire que je me suis donné il y a quelques temps déjà. C'est drôle de constater le nombre de gens qui aiment suivre les péripéties de ce personnage qui n'en est pas un. (Oui, j'ai vraiment un humour de merde.) Forcément, ça a permis de développer des amitiés avec certaines personnes. Voilà ce que j'aime avec le commerce : développer des liens avec les gens.

À ce propos, Chloé, une cliente devenue une amie, qui nous a aidé plusieurs fois pendant la fin de l'année, m'a offert une aquarelle pour mon anniversaire. C'est ce dessin qui m'a donné envie d'écrire cette note. C'est peut-être bête, mais cette création canalise tout ce qui me représente.

Les moutames domineront le monde !

J'ai su garder mon âme d'enfant (et j'en suis fier). De plus, je suis déterminé à partager mes délires et ma passion de la BD à travers un métier qui ne cesse pas de me faire grandir à bien des niveaux. Quand je vois les sourires d'enfants heureux des lectures que j'ai pu leur partager, des adultes rigolant de mes bêtises et appréciant mes conseils, je me dis que je dois faire plutôt correctement mon travail. (Ne serait-ce pas un peu de confiance en soi que je perçois là ?)

Voilà. C'est tout ce que j'avais dire. Rien de très construit ou d'intéressant au final. Juste une petite réflexion suite au cap des 30 ans. C'est probablement ça qu'on appelle la maturité. Comment ? C'est quoi ce titre ? C'est quoi un moutame ? C'est simplement la fusion parfaite entre un mouton et un hippopotame ! (On repassera pour la maturité.) Un jour, je vous expliquerai.