samedi 18 août 2018

Comment ? Vous n'avez pas tout lu ?

Histoire de reprendre tranquillement le rythme du blog, parlons à nouveau d'un sujet léger. Après tout, c'est toujours l'été avec son soleil et sa transpiration des aisselles. Hum... Sérieux, ai-je dit ? Mouais. Bref.

Quand vous travaillez en librairie, il faut suivre le rythme des parutions en lisant un maximum de choses. Cela vaut pour les nouveautés, mais également pour le fonds. Être calé sur l'actualité est une chose, mais savoir conseiller sur des séries terminées, entamées et des classiques est tout aussi important.

On peut s'en passer, mais difficile de rester un minimum convaincant en bande dessinée si on avoue ne pas connaître Astérix, Blake et Mortimer ou Tintin. Après, ces exemples sont tellement ancrés dans la culture populaire qu'on peut s'en sortir sans les avoir lu. Mais bon, vous voyez l'idée.  

Il est primordial de cultiver sa curiosité quand on est libraire. Il ne faut pas se contenter de son genre de prédilection, ce qui ne sous-entend pas de le mettre de côté. Dans mon cas, je suis devenu passionné par la bande dessinée via le comics. Avec les années, c'est un genre où je suis devenu à l'aise. Pour mon patron, ce n'est pas trop son truc. Il est davantage attiré par la BD franco-belge. Il y a aussi la différence de générations qui joue. Nous n'avons pas été marqué par les mêmes titres. Du coup, nous sommes assez complémentaires.

Nous ne nous reposons pas sur nos lauriers pour autant et nous n'hésitons pas à piocher chacun dans des genres où nous sommes moins à l'aise. Je lis ainsi régulièrement des polars et des BD historiques comme d'autres styles. Pareil pour le grand manitou. Nous n'avons pas nécessairement les mêmes avis ou le même enthousiasme sur des lectures communes, mais ce n'est pas plus mal. L'objectivité, ça n'existe pas.

Avec tout ça, est-ce que nous avons tout lu ? Évidemment que non. Je sais, ça peut faire un choc et casser le mythe du libraire lisant derrière sa caisse toute la journée. Vous êtes tellement loin de la réalité si vous pensez que c'est le cas. Hormis durant l'été, et encore, nous n'avons tout simplement pas le temps de lire au travail. On enchaîne les albums chez nous tout au long de la semaine. 

Mais vous savez quoi ? Même si nous pouvions trouver le temps de lire au boulot en plus de le faire en dehors, on ne pourrait pas être calé sur tout. Pour rappel, rien qu'en bande dessinée, il y a 5000 nouveautés par an. C'est humainement impossible de tout connaître. 

Par conséquent, il arrive qu'un client demande si on a lu telle nouveauté. Forcément, le hasard étant un drôle de blagueur, il s'agit pile-poil du livre qu'on n'a pas lu. Par contre, ce qui se trouve sur le reste de l'étagère, c'est le cas. Peu importe, la personne veut notre avis sur ce titre précis. Parfois, elle enchaîne les demandes sur plusieurs albums qu'on n'a pas parcouru. (Ils en ont des problèmes ces libraires, non ?)

Je ne vous cache pas, c'est frustrant au départ. À mes débuts (oula, ça sonne vieux), j'avais l'impression de ne pas être compétent. Heureusement, la confiance vient avec le temps. (Même pour moi !) On relativise et on se rend compte qu'on ne peut pas être partout. Lire de tout, certes, mais en préservant le plaisir de la lecture, ce qui passe par quelques pauses. Il ne faut pas en avoir honte. Le métier de libraire ne se résume pas à la lecture. Il est polyvalent et comporte pas mal de manutention. Ce n'est pas parce qu'on ne lit pas qu'on ne travaille pas. (Tiens, on dirait un slogan politique.)

Ce que mes quatre premières années dans ce métier m'ont notamment appris, c'est de ne pas hésiter à dire qu'on n'a pas lu tel ou tel ouvrage. C'est gênant au début, mais au fur et à mesure, on parvient à tourner ça à la rigolade, tout en faisant comprendre à la clientèle la masse importante de sorties. Dans la quasi-totalité des cas, les gens comprennent. Pour les autres, ils s'en remettent. Et puis, il y a des astuces pour pallier au manque de temps de lecture. Être à l'écoute des avis de ses confrères et de ses clients est sans doute le meilleur moyen de parvenir à conseiller un minimum. 

Pour finir, j'espère ne jamais dire un jour que j'ai tout lu. Ça signifierait l'absence de surprises à l'ouverture de cartons. Savoir qu'il y a une richesse quasiment inépuisable en BD est un carburant quotidien à la boutique. C'est ce qui me donne la gnaque de continuer ce boulot pour faire de belles découvertes que j'aurai plaisir à partager, et ce, même si je dois parfois dire que je n'ai pas lu certaines parutions. Ce n'est pas grave.

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